jeudi 29 août 2013

Faber, le destructeur, Tristan Garcia



A première vue, le nouveau roman de Tristan Garcia impose un monument, une promesse. Déjà de toutes parts, il jouit d'une attention particulière. Toi qui en as lu d'autres, tu préfères en avoir le coeur net. Dépourvu de tout jugement hâtif, tu t'attaques à Faber, le destructeur.

La légende de Faber prend vie à Mornay. Dès son plus jeune âge, sa présence est telle qu'il fascine autant qu'il dérange. Il est un génie qui a le diable au corps. Aux yeux de Basile et Madeleine, c'est l'esprit de révolte qui s'incarne enfin. Il est flamboyant. Il va les sauver de leurs humiliations et de cette vie rongée par l'ennui. Il devient leur héros. A partir de cet instant, il ne doit plus leur échapper. 

Quand tu le retrouves bien des années plus tard (c'est la première fois que tu le vois), il n'est nulle part, il n'est rien. Le train pour la vie d'adulte, il l'a clairement manqué. Cette déchéance, Basile et Madeleine ne s'en satisfont pas. Ils doivent à Faber une autre fin. Il ne leur reste alors qu'à écrire son retour.

Face à un tel énergumène, forcément, tu t'interroges. Mais qui est-il, sinon la concentrations de nos illusions perdues, un exutoire de nos vies rêvées et de nos vengeances interdites ?

Faber, le destructeur, est publié chez Gallimard


lundi 26 août 2013

L'invention de nos vies, Karine Tuil



L'effet est immédiat. A peine tu entres dans le roman de Karine Tuil, L'invention de nos vies, que tu es pris dans un tourbillon, tu ne peux plus le lâcher. A savoir si tu le veux, il est bien trop tard pour t'en soucier.

Sam Tahar occupe désormais toute la place. Magnétique et mystérieux, il attire, on l'envie. Il incarne un rêve américain en puissance, un conte de fées. C'est trop beau pour être vrai. Mieux (pire) que ça. Sa vie est déjà un roman, il y a bien longtemps qu'il a commencé. 

Il te faut remonter au temps où Sam se faisait encore appeler Samir. Prisonnier de cette identité qui, c'est certain, le discrimine, il crée la confusion. On le prend pour un juif, c'est fâcheux, mais c'est une opportunité qu'il doit saisir. 

Bien sûr, il n'oublie pas Samuel, dont il devient le substitut éclatant, lui le juif anonyme, l'écrivain incompris. Et Nina, une sensualité à ne savoir qu'en faire, peut-être là son seul regret. Vingt ans qu'il est sans nouvelles, cela ne pouvait pas durer.

A partir de là, tout s'enclenche. Dans cette course contre la vérité (tu ne sais pas à quel point tout cela va l'éclabousser), la tension est palpable, la menace de plus en plus pesante. La trahison, elle, a tous les visages. C'est un drame qui se joue maintenant. A l'origine, une chasse au bonheur, pourtant.

L'invention de nos vies, de Karine Tuil, est publié chez Grasset.



jeudi 15 août 2013

La grâce des brigands, Véronique Ovaldé



Ce que tu sais de Véronique Ovaldé, son univers entre violence et merveilleux, ses personnages de femmes fortes et fantaisistes, cette allégresse dans la plume, tu t'attends, tu espères les retrouver - familiers mais inédits -  dans La grâce de brigands, son dernier roman. Américain, dit-on. 

Tu t'envoles donc pour la Californie. Travelling sur ses routes ensoleillées, Los Angeles, les villas de Santa Monica. On est là pour rêver. L'une d'elles t'ouvre ses portes, tu t'empresses d'y entrer. Plan resserré sur Maria Cristina Väätonen, écrivain. Le téléphone sonne. Il n'y a qu'elle pour décrocher.

C'est un coup de fil qui dérange, qui la renvoie vers un passé qui ne lui confère pas le beau rôle. Elle est la fille indigne, la mauvaise soeur. Alors tout défile, son enfance dans la contrée brumeuse de Lapérouse, son affranchissement, sa détermination à devenir écrivain, Claramunt, sa vie, son oeuvre. Une trajectoire d'étoile filante. 

De l'histoire de Maria Cristina, de celle qui est racontée ici, tu n'en perds pas une miette. Et le charme opère, toujours.

La grâce des brigands, de Véronique Ovaldé, est publié aux éditions de L'Olivier.